lundi 14 juillet 2008

Heureux qui, comme Ulysse…

J'ai passé pas mal de ma vie dans les avions, et lorsque j'avais quelques instants de loisir à bord, j'aimais bien regarder par un hublot la "Terre vue du ciel". Et ces paysages qui défilaient dix mille mètres plus bas m'inspiraient bien des rêveries.
Survolant l'Europe et voyant passer lentement montagnes et forêts, j'imaginais ces hommes, mes ancêtres, qui, il y a quelques siècles, parcourraient tout cela à pieds, à cheval ou à dos de mule. Je songeais à Charlemagne et à ses guerriers, partis de Belgique vers le sud, vers la Septimanie, pour aller foutre sur la gueule des Sarrasins, les refouler de l'autre côté des Pyrénées et fonder les Marches d'Espagne. Puis remonter vers le nord et parcourir plus de 1500 km pour aller foutre sur la gueule des Saxons, puis, après un bref séjour à Aix-la Chapelle, descendre vers le sud-est pour aller foutre sur la gueule des Lombards, et ainsi de suite… Et chacun de ces hommes savait, au départ de ces harassantes expéditions qu'il allait au devant de sa propre mort. J'imaginais le long cortège de ces hommes suants sous le soleil ou, sous la pluie et la grêle, arc-boutés pour dégager le chariot embourbé.
Puis, après les forêts montagneuses, je contemplais la plaine, patchwork de rectangles verts, bruns, jaunes… En survolant la France, feu le roi du Maroc Mohammed V confiait paraît-il à son interlocuteur français: "Votre pays est un grand jardin.". Un grand jardin, en effet, fruit du labeur de générations de paysans. Et de ci, de là, dans ces plaines, une ville, un village, avec en leurs centres une église ou une cathédrale, des ponts de pierre multiséculaires, des abbayes et toutes sortes de vénérables monuments. J'imaginais les chantiers de l'époque, grouillants de manœuvres, de maçons, de tailleurs de pierres…
Mais je suis un incorrigible rêveur! J'imagine des choses qui n'existent pas. Tout le monde sait bien que ce sont les immigrés qui ont construit la France! Tous ces chantiers du moyen âge devaient être peuplés de nègres et d'arabes mal payés qui bossaient là pour le compte de salauds de Français racistes qui, non contents de les exploiter honteusement, les représentaient, sur les enluminures des parchemins de l'époque, uniformément blancs pour que l'Histoire oublie complètement tout ce qu'on leur devait! On se demande même comment de tels documents racistes et révisionnistes peuvent encore être consultés librement! Et Charlemagne et ses sbires n'étaient que des beaufs brutaux et avinés. Quant à Charles Martel, le pire de tous, ce n'était sans doûte qu'un gros con xénophobe et criminel qui devait puer de la gueule et des pieds et qui, par l'ignoble agression raciste de Poitiers a empéché l'Europe de devenir la grande et radieuse Andalousie qu'elle aurait dû être, véritable Eden de prospérité et de tolérance, couvert de frais patios et de fontaines gazouillantes...
Mais trêve de rêveries et d'ironie politiquement incorrecte. Calme toi Alcuin! Caaaalme toi! Ne cède pas à la colère! Elle est mauvaise conseillère et elle n'est pas chrétienne...

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